Quelles étapes une commune doit-elle suivre pour rénover son parc de luminaires ? Etat des lieux, diagnostic, audit… Quelles sont les différentes phases d’une démarche visant à diminuer les consommations d’énergie, réduire les pollutions lumineuses tout en améliorant la qualité de l’éclairage ?
En matière de maîtrise de la consommation d’énergie, l’éclairage public est un enjeu important pour les municipalités. En France, selon l’ADEME, l’éclairage public représente 16% de la consommation énergétique totale des communes, 17% de leurs dépenses (budget de la commune) et 41 % de leur facture électrique. Selon le projet européen Streetlight-EPC, la France compte 10 millions de points lumineux en éclairage extérieur pour une consommation annuelle de 5,6 TWh, soit 1 % de la production totale d’électricité.
Or, le potentiel de réduction des consommations d’éclairage public est énorme. Plus de la moitié du parc est obsolète et sur-consommatrice d’énergie (présence de boules diffusantes, de lampes à vapeur de mercure…) et près de 25 % des luminaires en service ont plus de 25 ans, selon l’ADEME.
PROCÉDER À UN AUDIT DE L’ÉCLAIRAGE PUBLIC
Comment une commune doit-elle procéder quand elle souhaite optimiser les dépenses liées à l’éclairage public ? Quelles sont les étapes à suivre ? Si la commune en a les ressources (humaines et financières), elle peut tout d’abord décider de procéder elle-même à un audit de l’éclairage public. Si elle n’en a pas les ressources, elle peut déléguer cette tâche à une entreprise tierce.
Un tel audit se compose d’un état des lieux et d’un diagnostic. L’état des lieux consiste à faire l’inventaire du parc existant, notamment des réseaux, qu’ils soient enterrés ou non. Le diagnostic, lui, a pour objectif d’analyser le « parc éclairage public » grâce à des indicateurs comme le nombre de points lumineux au km, la puissance moyenne par point, la répartition par type de lampe, l’état général des luminaires, la puissance annuelle consommée par habitant, les dépenses annuelles par habitant, le temps de fonctionnement, etc.
Le diagnostic a également pour but d’identifier les solutions permettant de réduire le coût global de l’installation, de diminuer les consommations d’énergie, d’améliorer la qualité de l’éclairage et de réduire les pollutions lumineuses. Les estimations d’économies réalisables, à la fois sur un plan énergétique et financier, doivent être exprimées en tenant compte de la réglementation en vigueur (normes NF C- 14-100 et 17-100, NF EN 13201 et EN 12464-2).
« Le diagnostic matériel, énergétique, photométrique et environnemental que nous réalisons a pour objectif d’évaluer les performances des installations d’éclairage et de définir un schéma d’orientation fonctionnel et technique en vue de réduire la consommation électrique et le bilan carbone, diminuer les coûts d’exploitation tout en améliorant la qualité de l’éclairage », déclare Thomas Noël, gérant d’Ilico Lighting, bureau d’études indépendant en éclairage.
Avant de se lancer dans un diagnostic de l’éclairage public, il est à noter que l’ADEME propose un outil de pré-diagnostic appelé OPEPA. C’est une première approche des économies financières et énergétiques atteignables en cas de rénovation du parc. Mais cette première approche ne se substitue en rien au diagnostic en tant que tel.
AUDIT ÉCLAIRAGE : PAS OBLIGATOIRE, MAIS FORTEMENT RECOMMANDÉ
L’audit éclairage n’est pas obligatoire pour une commune, sauf si la compétence éclairage a été transférée. Mais cet audit se révèle très utile pour toute démarche de rénovation du parc éclairage d’une municipalité, tant au niveau de la consommation énergétique que des coûts de fonctionnement. Et, pour certaines formes de marché public, il est obligatoire. Autant s’en doter une bonne fois pour toutes.
Selon l’AFE (Association Française de l’Eclairage), le coût d’un diagnostic éclairage varie entre 8 et 20 euros HT par point lumineux. Tout dépend des objectifs et du périmètre de l’étude (maintenance, rénovation, économie d’énergie…), de l’ampleur du patrimoine éclairage audité, de l’accessibilité des installations, etc.
Pour réussir le cahier des charges relatif au diagnostic de l’éclairage public, l’ADEME fournit un guide de rédaction destiné aux collectivités bénéficiant de ses aides financières dans le cadre de ce que l’ADEME appelle son dispositif de soutien aux études d’aide à la décision.
Selon l’AFE, un audit complet comprend les livrables suivants (qui peuvent varier en fonction du cahier des charges initial) : une base de données géoréférencées de l’ensemble des installations, un rapport principal, les relevés photométriques réalisés, un schéma directeur d’aménagement et de rénovation (SDAR) et un document de synthèse.
Pour ce qui est du financement, outre les dispositifs prévus par l’ADEME, les syndicats d’énergie, le conseil général, le conseil régional voire le FEDER (Fonds européen de développement régional) peuvent apporter une prise en charge partielle ou totale du coût d’un audit éclairage.
CHOIX DU PRESTATAIRE : ESCO, CABINET INDÉPENDANT OU ORGANISME PUBLIC ?
Si la commune choisit de passer par un prestataire, le choix de ce dernier est primordial et ne doit pas répondre – autant que possible – au seul critère de prix. Les compétences requises sont en effet nombreuses : électricité, éclairage, urbanisme et architecture, techniques et outils de relevés, SIG (systèmes d’information géographique), maîtrise de l’environnement normatif… En outre, il est conseillé, si le cadre du marché le permet, de rencontrer les entreprises candidates.
« Il y a deux paramètres à prendre en compte lors d’un projet d’optimisation de l’éclairage public : l’état des finances de la commune et son objectif final : mettre en conformité les nouveaux systèmes (éclairer mieux) tout en économisant le plus d’énergie possible (pour moins cher) ou bien minimiser l’investissement de départ. Plus la marge de manœuvre financière de la commune est faible, plus elle va avoir tendance à confier le projet à une entreprise extérieure se rémunérant sur les économies réalisées, via un contrat de performance énergétique », note Thomas Noël (Ilico Lighting).
Les entreprises qui se rémunèrent sur les économies d’énergie réalisées s’appellent des ESCO (Energy Service Companies). Concrètement, les ESCO rassemblent les informations sur les opportunités d’optimisation des consommations énergétiques dans l’objectif de mettre en œuvre, par la suite, les solutions techniques ou les services permettant les optimisations énergétiques identifiées, avec garanties de performances. Et si la commune le souhaite, les ESCO peuvent financer l’investissement en se rémunérant sur les économies réalisées sur une période de plusieurs années.
« Lors du choix d’un prestataire, il faut faire attention aux éventuels conflits d’intérêts qui peuvent être présents. Il faut donc veiller scrupuleusement à ce que le prestataire ne soit pas en même temps fournisseur d’installations d’éclairage, de prestations de maintenance ou d’énergie », ajoute Thomas Noël.
A noter enfin : pour les communes de moins de 10 000 habitants, l’ADEME propose un dispositif baptisé Conseil en Energie Partagé (CEP) consistant à mutualiser un conseiller énergie de l’ADEME entre plusieurs communes. Le conseiller aura à cœur, lui aussi, de donner la priorité à la maîtrise de l’énergie sans privilégier une solution énergétique en particulier.