Face au défi logistique du déconfinement, les collectivités avancent masquées

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Un déconfinement au goût de libération conditionnelle. C’est plus ou moins la conclusion du discours du Premier ministre, qui annonçait mardi 28 avril les mesures nécessaires à la sortie de la quarantaine nationale au 11 mai, entre préservation essentielle du système de santé et redémarrage nécessaire de l’activité économique.

La date du déconfinement approchant à grands pas, nombreuses sont les communes, départements et régions qui s’interrogent sur la manière dont les territoires vont être en capacité d’aborder l’après-11 mai. Car la portée nationale du plan de sortie progressive ne saurait se construire qu’en partenariat étroit avec les collectivités territoriales, qui endosseront notamment la responsabilité de la réouverture des établissements scolaires mais également la remise en marche des transports ou encore la réouverture des commerces. Preuve de l’importance de l’échelon local, Emmanuel Macron était d’ailleurs en visioconférence jeudi 23 avril avec vingt-deux maires pour discuter des derniers arbitrages de sortie de crise. De fait, les édiles seront les premiers acteurs du déconfinement mais au-delà des 35 000 communes françaises, chaque niveau de collectivité sera impliqué et la nécessité de travailler ensemble promet d’exacerber les tensions déjà existantes entre les élus et les services de l’Etat, au premier rang desquels les Agences régionales de santé (ARS) pointées du doigt depuis le début de l’épidémie.  

QUID DES MASQUES ?  

Sujet qui cristallise les tensions : la question des masques. Dans sa dernière allocution, le chef de l’Etat a annoncé que chaque Français devrait pouvoir s’en procurer un à partir du déconfinement, propos renforcés par ceux d’Edouard Philippe, qui a bien confirmé « qu’il y en aurait assez pour faire face aux besoins à partir du 11 mai », ajoutant par ailleurs que « le port du masque sera rendu obligatoire dans les transports ». Objets de convoitise, les masques sont assurément un sujet brûlant et nombreux sont les élus qui ont devancé les annonces de l’exécutif pour commencer à s’équiper. Ainsi le 8 avril dernier, la Région annonçait la mise à disposition des collectivités de sa plateforme d’achat pour aider à la commande de matériel sanitaire : « des masques, du gel hydro-alcoolique ou encore, dans un second temps, du matériel de désinfection, en bénéficiant des avantages de sa centrale d’achat », selon ses propos. Des commandes groupées qui devraient permettre de bénéficier de « tarifs compétitifs » tout en s’appuyant à terme sur le réseau d’entreprises franciliennes déjà recensées sur la plateforme régionale solidaire Solutions Covid-19, lancée au début de la pandémie.

10 MILLIONS DE MASQUES DISTRIBUÉS PAR LA RÉGION

Le Conseil régional d’Île-de-France a par ailleurs déjà distribué par le biais de l’ARS plus de 10 millions de masques sur les 30 millions commandés, en priorité aux personnels médicaux et médico-sociaux, puis aux cultes, entreprises de transports et communes demandeuses, à hauteur de 20% du nombre d’habitants. Parmi ces 10 millions, 3,6 millions ont été distribués aux pharmacies franciliennes et sont destinés à équiper les malades qui peinaient à s’en procurer sur prescription médicale, faute de stocks suffisants jusque lors. Mercredi matin, la Région a commencé à distribuer dans les gares franciliennes des masques aux usagers des transports en commun, pour « amorcer en quelque sorte la pompe avec l’appui de 130 maires et pour que les personnes qui exercent des fonctions essentielles dans ce pays soient équipées », puisque « l’Etat nous dit qu’il faut des masques obligatoires dans les transports et il ne les distribue pas », selon les propos confiés au Parisien par la présidente Valérie Pécresse, présente à la gare St Lazare pour pré-équiper les usagers en kits gratuits de masques chirurgicaux.

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AU-DELÀ DES MASQUES, LES TESTS ET LE GEL

La capitale a quant à elle déjà distribué les 5 millions de masques dont elle disposait avant la crise sanitaire, et a passé commande de 7,5 millions d’unités auprès d’entreprises chinoises afin de garantir à chaque Parisien de pouvoir obtenir un masque en pharmacie dans l’optique du 11 mai. Nombreuses sont les autres municipalités franciliennes qui ont annoncé avoir mis en place des cellules de veille économique et commandé des masques pour leurs administrés, soit par la plateforme nationale StopCovid19.fr mise en place avec le soutien de Bercy, soit par leurs propres réseaux d’approvisionnement.

Dans son discours du 28 avril, Edouard Philippe a annoncé que la France recevrait 20 millions de masques grand public lavables à compter de mai et surtout, a incité les collectivités locales à en commander, soutenant que « 50% de leur coût serait pris en charge dans la limite d’un prix de référence ». Pour l’heure, il est à noter que la production nationale de ces équipements est passée de 15 à 40 millions de modèles FFP2 par mois, afin de massifier l’approvisionnement dans les meilleurs délais.

Outre les masques se pose également la question des autres fournitures sanitaires, tels le gel hydro-alcoolique, les blouses ou encore les tests de dépistage, sujets de bien des interrogations de la part des collectivités. Car ce seront bien à elles d’assurer l’organisation des « drives » où procéder aux tests rapides sans avoir à quitter son véhicule, et ce sont encore elles qui auront à gérer les lieux d’hébergement pour isoler les personnes testées positives, qu’il faudra d’ailleurs également penser à nourrir par des services de restauration. Du côté des tests, les départements devraient pouvoir mettre à profit les laboratoires habituellement consacrés aux analyses vétérinaires ou à la qualité des eaux. Mais de trop nombreux aspects logistiques liés à la reprise restent encore en suspens et dans la perspective de sortie du confinement, les élus sont en attente des clarifications quant à la répartition des rôles entre l’Etat et les collectivités locales. Les semaines à venir devraient laisser place à de nouveaux bras de fer entre parties prenantes, afin de tenter de lever les inquiétudes des élus et de laisser place à une meilleure coordination.

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